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Marinette Pichon : « Montrer que l’équipe de France est prête à accueillir la Coupe du monde »

Meilleure buteuse de l’histoire des Bleues (81 buts entre 1994 et 2007), Marinette Pichon mesure le chemin parcouru par le football féminin au cours des 20 dernières années.


GRAND! : Sportivement, économiquement, reconnaissez-vous aujourd’hui le football féminin de vos débuts ?

Marinette Pichon : La couverture médiatique, l’engagement des clubs, celui des présidents, les dispositifs mis en place par la fédération et la performance de notre équipe de France ont beaucoup évolués. Le fait que certains clubs se soient professionnalisés, cela aide. Malgré tout, la D1 est toujours régie par la Ligue de football amateur, et n’est donc pas considérée comme une ligue professionnelle. Mais deux ou trois clubs ont cette capacité à injecter de l’argent pour permettre à leurs joueuses d’être performantes et d’être dans une vie de sportive professionnelle. Les équipes du PSG, de Lyon ou de Montpellier y sont pour beaucoup car ce sont des incubateurs de talents, qui permettent d’avoir des équipes de France jeune et A alimentées avec des joueuses de haut niveau.

Cette évolution a-t-elle changé le regard du grand public ?

Oui très clairement. Aujourd’hui la qualité de jeu qui est proposé est de plus en plus alléchante. On a de plus en plus de buts, des filles de plus en plus athlétiques qui sont capables de réaliser de très belles choses, des transversales, des gestes techniques, des courses à répétition. Le niveau est monté en gamme dans la capacité à supporter la charge de travail et à la répéter.

L’équipe de France est-elle si loin de l’Allemagne et des États-Unis, favorites du Mondial ?

Je dirais que toutes les nations partent avec les mêmes cartes et les mêmes ambitions. Il y aura trois matches lors de la phase de groupe qui permettront de monter en puissance, de gagner en confiance de manière individuelle et collective. Cela veut dire qu’il ne faut pas se louper contre la Corée du Sud lors du premier match. C’est une nation accrocheuse, rigoureuse dans le dépassement physique, qui donne sans compter et n’est pas évidente à jouer. Ce premier match va conditionner la compétition mais aussi permettre aux filles de se rassurer, car lorsqu’on est sur son sol on sait très bien que l’on va être attendue. Elles ont le potentiel technique pour aller dans le dernier carré. Mais on sait tous que dans une compétition comme celle-là, il y a tellement de choses à gérer… On s’est tous projetés dans le parcours possible, et l’on voit que dès les quarts se présenteront les États-Unis….

La compétition se déroule en France, qu’est-ce que cela va apporter de bon ? Et de moins bon ?

Je dirais que l’avantage c’est qu’elles vont être portées par la ferveur populaire. On va montrer à tout le monde que l’équipe de France est prête pour accueillir cet événement majeur. On va confirmer aux médias qu’il faut nous faire confiance et que le foot féminin est un sport comme un autre pour les femmes et les jeunes filles. Cela peut susciter énormément de vocation de joueuses, d’arbitres, d’encadrement… Cela va faire découvrir des villes, des stades remplis aux couleurs de nos joueuses. Cela va permettre une mixité inter-générationelle dans les fans zones, et économiquement, cela peut avoir un impact si la France fait un super parcours. Il y a énormément de points positifs.
La pression médiatique peut jouer un rôle négatif. Il ne faut pas « jouer les matches avant d’entrer sur terrain », ne pas trop se projeter, ne pas s’éparpiller avec la presse, ne pas avoir peur de la mesure de l’événement, au contraire. Mais je crois qu’elles ont bien conscience que c’est une très belle opportunité de vivre ça.

Un engouement populaire, ce serait une forme de victoire ?

Une coupe du monde réussie, c’est des bons matches, des buts, de la joie des supporters, du monde dans les fan zones avant et pendant les matches. Et c’est une hausse des licenciées. Évidemment en parallèle cela s’accompagne d’un bon parcours de l’équipe de France.

Que voulez-vous leur dire avant ce grand moment de leur carrière ?

Savourer chaque minute, et je pense qu’elles vont le faire !

Marinette Pichon est l’auteure de Ne jamais rien lâcher, aux éditions First (avril 2018)

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