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Roland Garros, 350 millions d’euros pour rester au top

Le programme de rénovation des infrastructures du Tournoi s’achèvera en 2021.


Nouveaux courts, toit rétractable, zones pour les spectateurs et les médias… le programme de rénovation des infrastructures du Tournoi s’achèvera en 2021, au terme d’un plan d’investissement de 350 M€. Rien n’a été laissé au hasard pour positionner Roland-Garros à la pointe. 

Le cœur du tennis français bat chaque année un peu plus fort. Mois après mois, un nouveau Roland-Garros se dessine en effet, dans l’effervescence d’un ballet incessant d’engins de travaux. L’horizon de ce vaste chantier, au propre comme au figuré, s’établit à 2021. A cette date, Vinci Construction livrera le toit rétractable du Court Central, dernier volet du vaste programme de modernisation des infrastructures du tournoi du Grand Chelem. Débuté en 2015, il aura consommé plus de 350 millions d’euros d’investissements, financés par la Fédération française de tennis (FFT), propriétaire de la marque Roland-Garros et concessionnaire du site. Le prix à payer pour que les Internationaux de France conservent leur rang. Mais l’ambition est plus large, insiste le président de la Fédération française de tennis (FFT), Bernard Giudicelli. « Ce nouveau Roland-Garros doit faire rayonner le Tournoi,  la ville de Paris et notre savoir-faire, qui mêle histoire et créations contemporaines, avec les nouveaux courts, énonce-t-il. C’est une vision sportive tout autant que politique, pour affirmer nos forces face à Melbourne, New York et Londres, organisateurs des autres tournois du Grand Chelem. »

La Quinzaine sur terre battue, qui génère 80% des revenus du tennis français, avec un chiffre d’affaires  annuel de près de 230 millions d’euros pour la FFT, se projette désormais avec sérénité vers l’avenir. Le spectre de la délocalisation du tournoi, en 2010, s’est évaporé pour conforter l’enceinte parisienne. « Il est essentiel de faire croître nos infrastructures, de développer le bien-être des joueurs, des spectateurs, des partenaires… tout en respectant l’identité d’un Tournoi qui fait rêver aujourd’hui, et doit davantage encore le faire à l’avenir», appuie Guy Forget, le directeur du Tournoi, à GRAND!.

Dans la course aux armements mondiaux, la FFT, au diapason du tennis français et des décideurs politiques, qui en ont fait un argument pour les Jeux de Paris, veut voir les choses en grand. Mais il a fallu composer avec la réalité géographique du site du XVIe arrondissement. Au terme de l’agrandissement de mars 2019 vers le jardin voisin des serres d’Auteuil, la parcelle de Roland-Garros, nichée entre l’A13 et le boulevard d’Auteuil, jauge désormais 11,6 hectares, contre 8,6 auparavant. Bien loin encore des trois autres compétitions du Grand Chelem : l’Open d’Australie s’étire sur 20 ha, l’US Open 18,8 ha tandis que Wimbledon étend son gazon sur 17,7 ha.

Une contrainte dont les organisateurs s’affranchissent, au prix d’un long et soigneux examen urbanistique, environnemental et architectural. Les concrétisations s’enchaînent. Pour la Quinzaine 2018, trois nouveaux courts avaient déjà été livrés. Les enceintes n° 7 et 9, qui ont profité d’une rénovation-extension, avec des capacités respectives portées à 1500 et 550 places. Puis le court n° 18, construit en moins d’un an. Avec ses 2200 places, il dispose de la quatrième capacité d’accueil de « Roland ». Le nouveau village des partenaires du tournoi, localisé à un jet de balle du Central, a aussi émergé l’an passé. Ce bâtiment lumineux de 9650 m² héberge des vestiaires pour les 400 arbitres et 250 ramasseurs de balles, 17 salons privés…

En 2019, l’histoire s’accélère. Le 21 mars, un grand barnum signait l’inauguration d’une enceinte de 5000 places, le court Simonne-Mathieu. Implantée dans le jardin des serres d’Auteuil, cet édifice de verre semi-enterré et semblable à une verrière, signé de l’architecte Marc Mimram, illustre le souffle architectural dont Roland-Garros veut aussi se faire une spécialité. «C’est un pari audacieux qui est remporté, souffle, ému, Guy Forget. Le résultat illustre parfaitement le lien entre l’histoire du site et l’avenir. Cette enceinte est unique en son genre. J’aurais adoré y disputer un match.»

Court Simonne Mathieu, Photo : Christophe Guibbaud / FFT

Le confort des spectateurs a été soigné: des stores toile extérieurs motorisés protègent l’intérieur des caprices de la chaleur et de la lumière. Un marqueur du grand saut vers la modernité de « Roland », comme le souligne Stéphane Houdet, quatre fois vainqueur en Simple d’un Grand Chelem en tennis fauteuil, dont deux Roland-Garros. « Pour l’avoir vécu à Wimbledon, New York ou, surtout, Melbourne, où la chaleur est écrasante durant l’Open d’Australie, les enceintes modernes ne doivent plus être dépendantes du climat, tant pour les joueurs, que pour les spectateurs et téléspectateurs ».

L’édition 2019, retransmise dans 189 pays, donnera un aperçu déjà abouti du « nouveau Roland-Garros. Mais les regards sont déjà tournés vers les prochaines réalisations. Le « Central » Philippe-Chatrier, d’abord, actuellement rénové en profondeur par Vinci Construction, qui a démoli et reconstruit 80% de l’enceinte. Au terme de ce chantier titanesque mobilisant 800 personnes depuis juin 2018,  les 15 000 spectateurs profiteront d’un confort et d’une visibilité à toute épreuve. La livraison doit s’opérer avant les Internationaux de France 2019, qui débutent le 26 mai. Mais l’événement du Tournoi 2020, ou 2021 au plus tard, sera la mise en service de la toiture rétractable sur ce même court Central. Réalisée en acier et en toile translucide et étanche elle pourra se déployer en 12 minutes. Un aménagement complexe vu la portée et le poids de la structure (101 mètres, plusieurs milliers de tonnes). « Il est impossible de planter des poteaux au milieu du terrain, les acteurs du projet doivent donc assurer la stabilité de l’ouvrage avec peu de points d’appui », met en perspective Thierry Lamadon, directeur technique de Bureau Veritas Construction, qui assure le contrôle technique du « Nouveau Roland-Garros ».

Ce nouvel équipement est attendu avec impatience. « Le toit protège des aléas climatiques comme la pluie, mais il permet aussi de positionner le tournoi différemment, en permettant d’organiser des sessions de matchs nocturnes, souligne Stéphane Houdet. Cela profite à l’organisateur et aux joueurs, bien sûr, mais aussi aux spectateurs : le tournoi devient davantage accessible aux gens qui travaillent la journée. »

Au terme de la rénovation, en 2021 au plus tard, le site passera, en configuration tournoi, à 40 000 places sur 18 courts, soit 2500 de plus qu’auparavant et, surtout un confort et une qualité d’accueil aux standards les plus modernes. De quoi tabler sur une augmentation de la fréquentation, estimée à 500 000 spectateurs environ l’an passé. La FFT estime que 10 000 à 15 000 passionnés supplémentaires pourraient, chaque jour, assister à des matches en soirée. « Le bénéfice de cette modernisation entraîne un cercle vertueux pour nous développer sur tous les segments, augmenter la diffusion du tournoi et générer des revenus supplémentaires », résume Guy Forget. Qui n’a de doute que sur un sujet : voir rapidement un joueur français remporter Roland-Garros.

Le vert, plus que jamais tendance dans l’événementiel

Si la terre battue reste ocre, le reste du tournoi vire au vert. La Fédération française de tennis a obtenu la certification « Breeam tailored Criteria », qui garantit un chantier respectueux de l’environnement. Une charte écoresponsable corédigée avec le ministère des Sports et WWF engage Roland Garros dans une démarche écologique : la nourriture non consommée est redistribuée à des associations tandis que 60% des déchets doivent être recyclés.

La FFT s’engage également dans le recyclage des milliers de balles utilisées. Une fois martyrisées par Williams et Djokovic, elles entament une nouvelle vie, servant de matière première à la fabrication de tapis de sport.

Cette « mise au vert » séduit au-delà du sport : le festival de Deauville a été certifié ISO 20121 par Bureau Veritas, l’un des tous premiers à bénéficier de cette certification en France. Cette norme vise à améliorer les pratiques de l’organisateur et des entreprises partenaires sur les thématiques de transport, de santé, de sécurité, d’énergie… La coupe du monde féminine de football est ainsi certifiée elle aussi. Les Jeux à Paris, eux, visent à réduire de 55% leur empreinte carbone par rapport aux deux dernières éditions.

Les marques ont bien intégré cette nouvelle donne : « le sponsoring se professionnalise avec une offre de plus en plus structurée et cadrée, explique Matthieu Lassalle, directeur général de Primagaz. Par exemple, nous discutons avec la Fédération Française de Hockey sur gazon pour l’aider à gagner en notoriété en France, mais aussi l’accompagner dans sa démarche de développement durable ». Le fournisseur de gaz accompagne également la course automobile dans la transition énergétique. « Donner du sens, c’est plus que jamais une nécessité pour les entreprises », conclut Matthieu Lassalle.

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